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Perspective 2022
6 février 2020

2022 : une campagne d'ores et déjà inédite 1/2

     En annonçant sa candidature pour le scrutin de 2022 dès le mois de janvier 2020, Marine Le Pen a officiellement lancé la prochaine campagne présidentielle. Intervenant très tôt dans l’agenda politique national, ce positionnement n'a pas manqué de surprendre, même si deux explications s’imposent immédiatement. En effet, en prenant date dès à présent,

1-    Marine Le Pen coupe court à d’éventuelles manœuvres, en interne, au sein du mouvement RN, comme en périphérie de la mouvance "Patriote – Souverainiste", lesquelles souhaiteraient promouvoir, pour 2022, un champion dont la stature présidentielle serait plus crédible que l'impression d'amateurisme hystérique, encore dans toutes les mémoires après le débat de l'entre-deux tours de 2017. La fille de Jean-Marie Le Pen a eu beau se relooker pour se donner une allure plus posée, rien ne dit que la greffe des lunettes prendra pour plus de cinquante pour cent des personnes qui voteront le jour J.

Quoi qu'elle fasse, la patronne du Rassemblement National n'offre pas les meilleurs gages de sérieux et de compétence que pourrait avoir un candidat plus "idéal", disposant d'un patronyme moins marqué et d'une image personnelle sinon plus lisse, du moins plus fraîche. Reconnaître à "Marine" une belle constance sur certains sujets ou des diagnostics avérés, à l'aune d'expériences récentes, n'en fait pas, pour autant, aux yeux des français, une spécialiste des domaines régaliens ou une fine connaisseuse des dossiers économiques. Certes, les citoyens ont pris l'habitude de voir le costume présidentiel bien trop large pour ceux qui, récemment, ont eu à l'endosser. Mais ces derniers hôtes élyséens avaient profité d'un doute favorable quand le personnage clivant de Marine Le Pen est entâché d'un préjugé définitivement défavorable. On ne se débarrasse jamais totalement d'une première impression négative.

J'ajoute qu'elle n'a jamais donné cette certitude réconfortante de savoir s'entourer d'une équipe, aussi fidèle que solide, susceptible d'apporter cette touche d'expertise qui lui fait tant défaut à titre personnel.

Toujours dans une perspective d'explication interne au mouvement souverainiste, la décision de Marine Le Pen permet à la candidate officiellement déclarée de préempter le label et toutes les idées force des éventuels programmes s'inspirant de ce créneau idéologique. Tous ceux qui, désormais, voudront aller au combat électoral prendront le risque de se voir reprocher de diviser, donc d'affaiblir, leur  propre camp. Ils n'ont aucune chance d'exister au plan médiatique face à celle qui pèse toujours plus de 20% des voix dans les sondages d'opinion et qui a déjà figuré au second tour de la mère des batailles électorales en France. Tout juste auront-ils la possibilité d'exprimer un ralliement en échange d'une inflexion de programme ou d'une participation plus active à une alliance future de gouvernement. De fait, l'initative de Marine Le Pen a sifflé la fin de la primaire "patriote" avant qu'elle ne se soit mise en place. 

 

 

2-    Marine Le Pen instrumentalise par avance les rendez-vous du calendrier judiciaire qui vont l’occuper, au même titre que d’autres cadres et représentants du Front/Rassemblement National, au cours des mois à venir. Celle que les sondages installent régulièrement dans un duel de second tour avec le président sortant préempte, avec habileté, le rôle de la victime politique. En se mettant en situation de dénoncer les stratagèmes d’un système judiciaire aux ordres de l’exécutif, elle espère focaliser le débat sur la victimisation de sa seule personne, bien plus que sur les faiblesses inhérentes à son programme. Ainsi, le débat électoral de 2022 se trouvera, une nouvelle fois, réduit à une peau de chagrin, sur fond de quasi guerre civile en regard des tensions qui fracturent encore plus la société depuis 2017. La forme polluera le fond.

Par ailleurs, la dénonciation de toute tentative d'impeachment anticipé à la sauce française lui assurerait la totale mobilisation des sympathisants RN, et, plus généralement, le soutien inconditionnel de son socle électoral. Il suffit de se rappeler la conséquence de la victimisation du Chirac-version1995 face au couple félon Balladur-Sarkozy, sur les électeurs de Droite (merci les Guignols de l’info !), pour imaginer l’impact qu’aurait toute décision d’inéligibilité, voire une simple mise en examen, embarrassante sur le fond, mais trop tardive sur la forme. Tous les contestataires à Emmanuel Macron (Gilets jaunes, mécontents des réformes successives…) trouveraient là un étendard sous lequel ils pourraient se rallier pour espérer, enfin, une victoire sur leur "bourreau", au-delà de toutes leurs divergences d'opinion.

Pour autant, ce contre-feu conspirationniste, allumé préventivement par Marine Le Pen en janvier dernier, ne suffirait pas à rallier en masse les électeurs LR : la ficelle du complot dénoncé à corps et à cri est trop connue pour abuser nombre de ces électeurs supplétifs que Marine Le Pen doit obligatoirement séduire pour emporter le scrutin. Sauf qu’il suffirait que le procès Fillon, prévu en avril, tourne au fiasco judiciaire pour les procureurs politico-médiatiques de 2017 (sous la forme d’un non-lieu, voire d’une absence de peine effective, par exemple) pour que ces mêmes électeurs de Droite se convainquent du fait que leur victoire annoncée de 2017 leur a bel et bien été volée par des forces oeuvrant dans quelque cabinet obscur. Cela suffirait à ce qu’ils veuillent alors prendre leur revanche, par tous les moyens, y compris et surtout en accordant un match retour victorieux à Marine Le Pen, à défaut de pouvoir récupérer un François Fillon, parti sous d’autres cieux professionnels. Car preuve aurait été faite, avec le pschitt judiciaire de la vraie-fausse affaire Fillon, qu’il existe réellement une parodie de justice jouée par un "parquet aux ordres", qui bénéficie du soutien actif de mass médias au service exclusif des "puissances de l’argent".

Dans ces conditions, le duel réchauffé de second tour verrait la logique "tout sauf Le Pen" des scrutins 2002 et 2017 laisser la place à celle d'un "tout sauf Macron", brusquement devenu présumé comploteur bénéficiaire opportuniste. Les électeurs de droite trouveraient une légitimité nouvelle à ne pas tomber « une fois de trop » dans le traquenard de diabolisation inventé en 1985 par un François Mitterrand, habile à embarrasser la Droite avec son extrême, mais très à l’aise, de son côté, pour siphonner sans vergogne toutes les voix sur son extrême-gauche.

Pour se venger de l’infamie vécue par le châtelain de la Sarthe, il est même possible que les électeurs de Droite décident de voter utile, comprendre Marine Le Pen, dès le premier tour, surtout si LR est incapable de proposer une candidature crédible à prétendre passer l’épreuve de sélection du tour initial.

Quant aux électeurs LFI de 2017, ces mêmes conditions pourraient conduire ceux que le comportement erratique de Jean-Luc Mélenchon a déçu, à passer, sans état d’âme, d’un extrême à l’autre en ralliant une candidate symbolisant, dans ce « martyr » politico-médiatique, une résistance populiste luttant contre l’oppression "judiciarisée" des élites. En espérant cette chance de succès qu’ils savent interdite au député de Marseille !

 

     On comprend tout le paradoxe qu’il y aurait à constater, au soir du second tour de 2022, qu’une même problématique politico-judiciaire, produise l’effet inverse de celui de 2017, face au même Emmanuel Macron. Si Marine Le Pen était élue, ce serait principalement parce que "les boules puantes", jadis dénoncées par François Fillon, auront été gérées très en amont de la campagne électorale, par une justiciable pas comme les autres, parce qu'ayant fait une annonce de candidature très anticipée. Cette campagne 2022 sera inédite... Et ce n'est qu'un début.

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  • Je vous propose une analyse pertinente des sujets faisant l'actualité du moment et embrassant les domaines régaliens, politiques et sociétaux, afin de susciter ou d'alimenter un débat éclairé, en prévision du scrutin présidentiel de 2022.
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